A votre langue torture de moi, de mes précipices de désir qui me faisait rester là au bord de moi, comme enfant roi à l’aube d’être, comme agneau, naissance de loutre effarée.
A cet objet d’entrelacs aux fonctions diverses et magnifiques comme me dire votre désir, mouiller vos lèvres ingénues, me murmurer vos secrets d’autrefois.
A cet appareil de mentir, et de dévorement de moi tout à la fois.
A cet animal délicat.
A ce que de vous elle laissa en moi, comme pyramides d’Egypte pour mille siècles sans trépas, empire à pas feutré, joug somnolent, indolente soumission…
A son artifice adroit.
A sa pulpe venimeuse, qui abreuvait ma quête d’autrefois.
A sa verve.
A sa naïve parole, aux mots tracés par ses courbes, ses figures, circonvolutions énigmatiques et joliment habiles qui me disaient l’intime de vous.
A sa promesse d’autres parcours plus étroits, chemin de courses effrénées, en chevauchement ambigu, contigu, vers votre secret endroit.
A sa langueur d’assassine, noire comme araignée, sous tissu de dentelle fine.
J’ai toujours dans l’œil de ma mémoire -en pénombre- votre buste droit, odalisque bambine que mon stratagème avait rapproché de moi, tout à coup s’abattant… puis votre langue cherchant la mienne pour me dire tout ce que l’on ne dit pas jamais.
Le temps passe pourtant.